Alors que l’Ouganda a versé près de 195 millions de dollars à la République démocratique du Congo pour indemniser les victimes de la guerre de six jours, moins de 2 % de cette somme a effectivement été distribuée. Une enquête du CREFDL révèle une série de transferts suspects, de dépenses non éligibles et de retraits en espèces qui interrogent la gestion du Fonds de Réparation des Victimes des Atrocités Ougandaises (FRIVAO).
Le 24 janvier 2024, un premier virement d’un million de dollars est effectué en faveur de Clic Change Sarl, un bureau de change agréé par la Banque centrale du Congo, situé à Gombe. Le 6 juin 2024, alors que le ministre de la Justice expédie les affaires courantes, un second transfert de 3,2 millions USD est ordonné vers la même structure. Au total, 4,2 millions USD sont versés à ce bureau, soit le double du montant réellement perçu par les victimes à ce jour.
Selon les chiffres du CREFDL, seulement 2 088 136 USD ont été distribués aux victimes jusqu’au 8 octobre 2024, sur les 103 millions USD prévus. Ce retard est attribué à la lenteur administrative et au manque de qualification du personnel chargé de l’identification et de la certification des bénéficiaires.
Le 11 août 2023, le ministre de la Justice ordonne un virement de 52 975 000 USD vers le compte FRIVAO V/C USD. Un mois plus tard, 5 % de cette somme (soit 2 648 750 USD) sont redirigés vers un autre compte au titre de « fonds de gestion », sans justification comptable. Le 29 septembre 2023, un retrait en espèces de 1,5 million USD est effectué, sans trace dans la comptabilité officielle.
Le 15 janvier 2024, le ministère acquiert deux bus pour 228 000 USD auprès de Panafrique Motors, sans appel d’offres ni disponibilité de crédits. Cette dépense, jugée non éligible par le CREFDL, contrevient aux clauses de l’arrêt de la Cour internationale de Justice.
Le même jour, 200 000 USD sont versés à Jacques Baruti Lindoni, au titre d’indemnisation judiciaire, suite à un jugement datant de 2018 concernant la destruction d’un aéronef réquisitionné par les FARDC. Ce paiement, bien que légalement fondé, n’entre pas dans le cadre des réparations liées à la guerre de Kisangani.
Face à ces irrégularités, le CREFDL recommande la dissolution du FRIVAO et propose de confier la gestion des indemnisations à des structures disposant de lignes budgétaires dans la Loi de finances, telles que la COGEBISCO ou le FOLUCCO. L’organisation appelle également à l’ouverture d’une enquête judiciaire sur tous les gestionnaires des comptes liés au FRIVAO depuis le premier encaissement.
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