L’opposant Martin Fayulu (Photo) suggère un « dialogue pour une cohésion nationale en vue de faire face à la menace de balkanisation de la RDC ».
Cette proposition est diversement appréciée par la classe politique congolaise.
Contrer la menace
« Le commandant du peuple Martin Fayulu appelle à la cohésion et à l’unité des filles et fils de notre pays pour contrer la menace de disparition de l’État congolais et de notre nation « , commente, sur TOP CONGO FM, Devos Kitoko, secrétaire général de l’Engagement pour la citoyenneté et la démocratie (Ecidé), le parti de Martin Fayulu.
En outre, « comment allons-nous préparer (les élections de) 2028, comment allons-nous entreprendre les principales réformes institutionnelles et les principales réformes, à priori, électorales. Il nous faut une loi électorale consensuelle, une Cour constitutionnelle qui met tout le monde à l’abri des soupçons, une commission électorale nationale indépendante impartiale. Pour nous, ce sont les principales thématiques pour lesquelles les filles et fils de ce pays doivent se mettre autour de la table et discuter « , ajoute-t-il.
Pas besoin de postes
Toutefois, précise le lieutenant de Martin Fayulu, « pour le commandant du peuple, il n’est pas question de ce que vous appelez en langage vulgaire : partage du gâteau. Nous n’avons pas besoin de partager des postes au gouvernement « , tranche, sans tergiverser, Devos Kitoko.
Si et seulement si…
Le parti de Moïse Katumbi conditionne, lui, le dialogue par une série de préalables à la cohésion nationale.
« La cohésion nationale se caractérise, notamment, par le respect des principes républicains dont la lutte contre l’impunité », réagit Hervé Diakiese, porte-parole de Ensemble pour la République.
« Nous avons eu plusieurs cas de massacres notamment à Kilwa, Luilu, Lubumbashi où il n’y a pas toujours de réponse judiciaire. On a eu l’assassinat crapuleux de Chérubin Okende pour lequel on n’a pas toujours de suite pénale conséquente. On n’a aucun exercice de liberté publique sur l’étendue du territoire national au niveau de l’opposition « , énumère-t-il.
« Ce sont des actes qui doivent être la preuve de la cohésion nationale avant de commencer à parler d’un quelconque dialogue et à quel niveau que ce soit. Donc, il faut d’abord que l’on soit dans une situation de normalité républicaine », pointe-t-il.
« Il ne faut pas aller vite en besogne. Les préalables dont je fais allusion concernent le concept cohésion nationale » , martèle-t-il, avant de lancer : » dans le cas d’espèce, nous ne sommes pas encore concernés ».
« Aujourd’hui, vous remarquez bien que l’État est totalement en inanition parce qu’un groupe d’individus a pris en otage la République et ne sait plus avancer après la tricherie électorale » , lâche-t-il, en conclusion.
Inopportun
Chez les pro-Kabila, on réfute toute idée de dialogue.
Et pour cause, « les gens avaient demandé le dialogue avant que les élections n’aient lieu pour discuter sur ce qui divisait les gens. Les autres n’avaient pas accepté. Ils ont forcé l’organisation de leurs élections. Aujourd’hui, on veut le dialogue, pour faire quoi ? », s’interroge Lucain Kasongo du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (Pprd), parti phare du Front commun pour le Congo, la plateforme de l’ancien Chef de l’État, Joseph Kabila.
« Quelqu’un qui est en plein mandat, qu’il termine son mandat. C’est l’Union sacrée qui gère, qui a l’armée et la police, qui a tout. Qu’est-ce qui manque pour résoudre les problèmes des Congolais ? », lance-t-il.
Quand on lui fait remarquer que la proposition vient d’un des leaders de l’opposition, Martin Fayulu, l’ex-député national rappelle que « l’Écidé a participé aux élections ».
En conséquence, » ça sera le dialogue de ceux qui ont participé aux élections chaotiques de 2023. Nous n’avons pas été partie à ces élections. S’ils négocient aujourd’hui, ils vont parler entre eux » , tranche-t- il.
Et de toute façon, » c’est aujourd’hui qu’on parle de la menace de balkanisation ? Ça n’a pas commencé avec le régime en place mais depuis longtemps. En 2012, on disait que c’était le problème du Front commun pour le Congo (FCC). Que c’est le FCC qui, voulant s’éterniser au pouvoir, avait créé le M23. Et pourtant, nous avons défait le M23 qui n’existait plus. Le dialogue ne nous concerne aujourd’hui », soupire Lucain Kasongo.
Dialogue oui, partage du pouvoir, non !
Enfin, à la majorité, le député national Eliezer Ntambwe se montre plutôt favorable.
« Je ne peux pas être contre le dialogue tant que le dialogue met ensemble les Congolais. Seulement, je ne peux pas soutenir un dialogue qui se mue en un complot contre la République « , souligne-t-il d’emblée.
« C’est-à-dire que nous venons blanchir les agresseurs avec des revendications d’occupation, de balkanisation. On ne l’acceptera pas « , clame-t-il.
Du reste, » cela devrait également être une démarche démocratique. C’est-à-dire qu’on accepte les résultats des élections même s’ils ne sont pas en votre faveur « , avance l’élu de Kinshasa, » opposé au concept d’un système hybride de gestion de la République où nous allons aux élections pour aboutir à un dialogue, afin de constituer un gouvernement de cohésion nationale ».
« Nous devons savoir ce que nous voulons « , argumente Eliezer Ntambwe.
» Rappelez-vous du mandat passé, à la création de l’union sacrée. On a vu des opposants venir, occuper des fonctions comme d’habitude. Mais ce sont des stratèges. Après avoir amassé un peu de sous, ils se sont rétractés « , lâche-t-il.
Pour l’opposant Seth Kikuni le Chef de l’État actuel « s’est attribué plus de 75% aux dernières élections, plus de 475 députés et 26 gouverneurs. S’il y aura dialogue, c’est pour lui demander ce qu’il fait à la tête du pays. Il se présente en diviseur plutôt qu’en réconciliateur ».
Eric Lukoki/Topcongo.live


